Concernant les violences commises à Gênes lors des manifestations anti-G8

16-09-2001

La Fédération anarchiste n’est pas restée inactive, en France, pendant les événements. Hors du terrain proprement médiatique, les libertaires ont protesté vigoureusement dans la rue, qui est notre terrain de prédilection, contre les violences policières commises à Gênes, en particulier l’assassinat le 20 juillet vers 17 h 30 de Carlo Giuliani. A Lille, à Clermont-Ferrand, Bordeaux, Strasbourg, à Lyon, et dans d’autres villes, les militants libertaires se sont mobilisés, seuls ou avec d’autres. Ils étaient près de 200 à Montpellier, 300 à Toulouse, 200 d’abord, puis 1 500 à Paris sous une pluie diluvienne. Dans le monde entier, des protestations ont eu lieu : Buenos Aires, Goettingen, Montréal, Hambourg, Sao Paulo, Barcelone, Madrid… Nous reproduisons ci-après un communiqué de presse, sorti « à chaud ». Notons que les médias français, si rapides à dénoncer les « anarchistes » comme responsables de tous les affrontements, et de tous les dégâts, ne se sont pas empressés de relayer notre réponse.

Face à des informations de la presse sur les violences commises à Gênes et qui tendent à décrédibiliser le mouvement anti-mondialisation, et particulièrement sa composante anarchiste, aux yeux de l’opinion publique, la Fédération anarchiste (France, Belgique) tient à exprimer sa position.
Tout d’abord, nous condamnons fermement l’ensemble des méthodes policières mises en œuvre pour contrôler les militants anti-mondialisation et en particulier, pour criminaliser les militants anarchistes. Les gouvernements ont visiblement choisi la stratégie de la tension et du harcèlement, avant le sommet (militants refoulés à la frontière, locaux anarchistes génois perquisitionnés plusieurs fois…), celui de la terreur et des armes à feu, pendant les journées de Gênes. Cette stratégie s’est révélée meurtrière. Ce sont bien les forces de l’ordre qui ont tiré à bout portant et à hauteur d’hommes, pour tuer. Pas les manifestants.
Pourtant, une partie de la presse désigne à l’opinion publique les anarchistes comme les responsables d’une telle situation, sans preuves. Cet amalgame douteux (la police tue, et ce seraient les anarchistes les responsables ?) a pour objet de diviser les protestataires entre eux.
En réalité, la première des provocations a été celle des États du G8 en convoquant un sommet de plus, alors que les précédents ont atteint des records de protestations et déjà fait une victime, en juin, à Göteborg. Le choix de l’Italie était particulièrement discutable puisque le mouvement anti-mondialisation y est très développé, laissant augurer les dizaines de milliers de protestataires au rendez-vous.
La police a tué un manifestant, un garçon de 20 ans. D’autres personnes sont grièvement blessées : tout ceci démontre pour la énième fois à qui appartient l’idéologie de la violence et la volonté de réprimer jusqu’à la mort. L’Etat italien, par l’intermédiaire de ses propres forces armées, entend assumer son rôle de casseur des conflits sociaux que le capitalisme mondial génère en Italie comme dans le reste du monde.
Dans la série de mobilisations entreprises par la plate-forme « anarchistes contre le G8 » par exemple et dont nous sommes signataires, il convient de préciser que le 16 juin, une manifestation à Gênes contre le G8, de 3 000 personnes, s’est déroulée sans aucun incident. Que la participation de 3 000 à 4 000 anarchistes dans la manifestation de jeudi à Gênes, en soutien aux immigrés sans papiers d’Europe, s’est faite sans le moindre problème. Que celle de vendredi après midi, appelée par les syndicats autogestionnaires italiens avec la participation d’un millier d’anarchistes fédéré(e)s, s’est déroulée sans incidents. Ces mobilisations anarchistes s’insèrent pleinement dans le cadre des mobilisations populaires, politiques et syndicales contre la tenue du Sommet du G8. Elles prouvent, s’il en était besoin, que nous n’appelons pas aux violences dont nous sommes accusés. Et nous déclarons qu’il y a d’autres violences bien plus condamnables que ces actions de rue : la misère sociale et économique dans toutes les régions du monde, la faim et l’asservissement des pays pauvres, les violations par les États des droits fondamentaux (circulation, logement…), la chasse et l’expulsion des étrangers sans papiers et la marchandisation de nos vies. Ces réalités quotidiennes sont vécues comme des violences sur la vie de millions de personnes, et elles sont les résultats des politiques mises en place lors de ces grandes réunions internationales. Et ce sont les anarchistes que l’on accuse de violences ?
Nous militons sur divers terrains, seuls, ou aux côtés d’autres structures (associations, syndicats…), mais toujours au grand jour. Ceux qui nous côtoient savent que l’on ne peut accuser « les anarchistes » de tous les incidents qui ont lieu à « Gênes » comme ailleurs.
Cette tactique du bouc émissaire vise à diviser le mouvement anti-mondialisation pour l’affaiblir. Les manifestations contre ces sommets ne datent pas de Seattle. Nous appelions déjà à manifester contre le sommet du G7 à Lyon en 1996. Aujourd’hui, la contestation s’est amplifiée et les gouvernements veulent détruire ce mouvement, par la répression, la criminalisation et la division. Cette réussite marquerait la fin d’un mouvement anticapitaliste renaissant, fort et international.
La Fédération anarchiste réfute les propos tendant à associer anarchistes à violent et qui tend à décrédibiliser tous les membres du mouvement libertaire.

Fédération anarchiste